Puglia
Le talon de la botte italienne bénéficie de conditions pédoclimatiques exceptionnelles pour la culture de la vigne. La péninsule du Salento, notamment, qui s'étire entre Adriatique et Mer Ionienne, est l'une des régions les plus ensoleillées et plus chaudes d'Italie. Une situation favorable au développement de la vigne par les colons grecs qui y accostèrent au VIIIème av. J.-C. et qui valut aux Pouilles d'être connues comme le " réservoir " de l'Italie (voire de l'Europe). En effet, les vins de la région, chargés en couleur et en alcool, ont longtemps servi à couper les vins des zones septentrionales.
Bien que la vigne fût déjà cultivée depuis des temps très anciens sur les terres du sud-est italien, c'est aux Grecs que l'on doit vraisemblablement nombre de variétés aujourd'hui considérées comme autochtones, tels le Negroamaro et l'Uva di Troia. Les Grecs y auraient également introduit la méthode de viticulture dite a alberello. Englobées dans la Magna Grecia (la Grande Grèce), les Pouilles sont aujourd'hui encore fortement imprégnées de la culture hellénique et ce, jusque dans la langue, certains dialectes locaux étant directement dérivés du grec ancien.
Suite à la victoire romaine sur Pirée, en 275 av. J.-C., les Romains étendirent leur domination dans cette région de la péninsule et donnèrent une nouvelle impulsion à la production et à la commercialisation du vin, notamment grâce au prolongement de la Via Appia jusqu'à Tarente et à la construction du port de Brindisi, en 244 av. J.-C., où d'énormes caves furent creusées dans la roche afin d'y stocker le vin pour en faciliter l'embarcation et l'expédition. Pas étonnant, dès lors, que Pline l'Ancien ait qualifié les terres de Manduria de viticulosae, c'est-à-dire " pleines de vignes ".
Bien que moins faste, la viticulture médiévale des Pouilles perdura néanmoins grâce à l'œuvre des moines, mais aussi au flair de l'Empereur Frédéric II qui y fit planter des milliers de pieds de vignes importés de Campanie. Il faudra néanmoins attendre la Renaissance pour que les vins des Pouilles accèdent à la reconnaissance des cours d'autres régions d'Italie et d'Europe.
Le drame du phylloxera de la fin du XIXème frappa les Pouilles avec un certain retard, ce qui permit à la région de continuer à approvisionner l'Europe du Nord durement touchée. On vit alors débarquer nombre d'entrepreneurs, français et allemands essentiellement, qui s'employèrent à en exporter le vin. Mais l'insecte finit par causer des ravages dans le sud également et, au lendemain de cette crise, les variétés indigènes de vigne furent massivement remplacées par d'autres cépages plus résistants. Dans un même temps, la culture des cépages Primitivo, Negroamaro et Uva di Troia fut intensifiée, dans le but d'amplifier la production de vin de coupage, sans aucun égard pour la qualité ainsi produite. Il faudra attendre les années 90 pour que les producteurs locaux réalisent l'énorme potentiel que leurs terres avaient à offrir et entament leur conversion vers une production de qualité.